L’ange de la chapelle :

petite méditation sur les présences invisibles

Il y a des présences qu’on ne nomme pas. Des êtres qu’on devine, plus qu’on ne voit. Des murmures dans l’air, des souffles discrets, des pas qui ne font pas de bruit. Ce sont les anges. Non pas ceux des tableaux aux ailes dorées, mais ceux qui se glissent dans nos vies, silencieux et fidèles, comme un parfum qu’on reconnaît sans savoir d’où il vient.

Dans la petite chapelle oubliée, un ange veille.
Il ne se montre pas, mais ses ailes emplissent l’air d’une douceur que seuls les cœurs attentifs savent percevoir.
« Je suis une chapelle… habitée par une invisible mouvance. J’ai en moi les ailes des créatures célestes… ».

On l’appelle ici Deux-Ailes. Il n’a rien du guerrier flamboyant qui terrasse le mal. Il est ange de campagne, de ruine et d’espérance. Il ne fait pas de miracles spectaculaires : il console, il attend, il prie « dans la lumière illuminée du crépuscule ».

Chaque fois que Christie s’approche de la chapelle, Deux-Ailes se réjouit :
« Voilà bien longtemps que, de son côté invisible, la chapelle n’avait plus entendu de cantique ».
Quand elle monte sur son échelle pour dégager le nom gravé dans la pierre, l’ange chante ; et son chant, comme un vent tiède, fait vibrer la nef blessée.
« De nouveau, je peux sourire à la face du monde… De nouveau, on peut voir qui je suis ».

Ces présences silencieuses nous rappellent que le monde est plus habité qu’il n’y paraît. Chaque geste de soin, chaque acte d’attention, chaque regard tendre, est accompagné par un invisible qui nous précède. Peut-être l’ange n’est-il que la figure intérieure de notre espérance, ce reflet de ce qui, en nous, « refuse de se laisser démolir ».

Et si nous osions croire que l’invisible est encore là, tout proche ? Qu’un ange, un souffle, un mystère nous accompagne ? Alors nous pourrions redire, comme dans cette vieille prière :

« Il a donné pour toi donner ordre à ses anges

de te garder sur tous tes chemins. » (Ps. 91)