Le silence est-il une réponse ?

Le silence est-il une réponse ?

 

Le silence est souvent vu comme un vide, un malaise, un problème à résoudre.
Mais pour certaines personnes, et notamment pour beaucoup de femmes autistes, le silence est un refuge sacré. Pas toutes les femmes bien sûr, mais enfin, beaucoup quand même. Trop de bruits nous entoure. Partout. Tout le temps.

 

 Le silence comme protection

 

Quand les stimuli du monde deviennent trop forts…
Quand la fatigue sociale est écrasante…
Quand les émotions débordent…
Alors, le silence est bienvenu. Le silence qui n’empêche pas d’ailleurs d’écouter de la musique, mais de la musique douce, en solitaire, toute seule, sans personne autour pour nous déranger. Se réfugier dans sa bulle, voilà qui répare. Souvent.

A chacun sa méthode, mais tout de même, un point commun : Le besoin fréquent de se retrouver seule, dans le silence, loin du monde.

Ce n’est pas fuir. C’est respirer.
Ce n’est pas s’éloigner des autres. C’est se retrouver soi-même.

 

 Le silence incompris

 

Mais ce silence-là est souvent mal perçu.
On nous croit froides, distantes, absentes.
Alors qu’à l’intérieur, tout est vivant.


Le silence est un langage que peu comprennent. Quand je vois les voitures avec la musique à fond alors que le chauffeur attend au feu rouge, comme s’il était seul au monde, comme si toutes les autres voitures sur les côtés et derrière lui ne comptaient pas. Comme si les piétons incommodés par ce bruit n’étaient pas là. Je ne comprends pas. Il n’y a rien qui me mette plus en colère.

 

Et je ne parle pas de toutes les fois où je vais dans un parc municipal pour profiter du chant des oiseaux, du silence, de la nature. Et oh malheur ! A ce moment-là, ce sont des groupes de jeunes avec leurs enceintes mises à fond. Impossible de se détendre. Et si j’ai la mauvaise idée de demander qu’on baisse le son, on m’insulte…

 

Cela me met dans des colères sourdes. Je rentre chez moi, en pleurs.

 

Dans Stéréotypie, Aurore vit ces silences-là.
Elle se tait pour se préserver. Et ceux qui l’aiment, comme Opalin ou Garance, apprennent à l’écouter… autrement.

 

 Et si le silence était une réponse juste ?

 

Il ne dit peut-être pas ce qu’on attend.
Mais il dit ce qui est là.
Il offre un espace. Une pause. Une prière, parfois.

 

Il répare et apaise. Aujourd’hui, je ne saurai pas m’en passer. Plus que jamais, j’en ai besoin.

 

Il y a quelques années, je partais même dans des ermitages en pleine forêt grâce à des monastères qui proposent ce type de séjour. Je m’installais ainsi dans une cabane en bois pour quelques jours ou quelques semaines. Je garde de ces périodes de solitude un souvenir merveilleux, comme si j’étais alors branchée sur une autre fréquence. Je respirais mieux, je me sentais tellement bien alors !

 

Là, dans le silence de la forêt, je me ressourçais complètement. Quand je revenais ensuite à la vie de tous les jours, dans mon centre-ville, la différence était encore plus frappante.

 

Le silence pour la personne autiste :

 

Il est crucial de comprendre que ce silence n’indique pas forcément un manque de pensées ou d'émotions. Bien au contraire. C’est un silence habité. Il peut être le résultat d’une surcharge sensorielle ou émotionnelle, où des stimuli comme le bruit, les lumières vives ou l’afflux de personnes peuvent engendrer un besoin de se retirer.

 

Ce retrait peut être interprété par l’entourage comme un mutisme ou un manque d'intérêt, alors qu'il est souvent une forme de protection. De plus, dans le silence, tout occupé par ses intérêts spécifiques, par ses passions, la personne autiste retrouve un équilibre qui avait été rompu ou par le bruit ou par un surcroît d’émotions.

 

Par exemple, en ce qui me concerne, coudre une poupée, confectionner un doudou en laine ou écrire une poésie, toute seule, en retrait du monde, soit en écoutant une musique douce, soit dans un complet silence, cela me régénère à l’intérieur. Je reprends des forces.

 

Le type de silence vécu par les personnes autistes est complexe et multifacette. Il est vital de reconnaître que ce silence peut être lié à une variété de facteurs, y compris des déficits en communication, des besoins de retrait en raison de la surcharge sensorielle, ou encore des comportements répétitifs. 

 

Plutôt que de dire : « Pourquoi tu restes toute seule ? », « T’en as pas marre de rester seule ? » ? « Ben dis donc, t’es un ours toi ! », « Un vrai pt’it chat sauvage ! » « T’es vraiment bizarre quand même, pourquoi tu t’enfermes comme ça ? », « T’es vraiment pas sociable toi ! ».

 

Il serait plus judicieux, tant pour les amis que pour les familles ou même les professionnels de santé de faire preuve de compréhension et d'empathie face à la diversité des expériences vécues par les personnes autistes. Tous ces jugements ne servent à rien si ce n’est à pousser la personne à fuir davantage encore les relations aux autres.

 

Par manque de silence (Mais pas que pour cela) :

 

On peut développer une fatigue extrême, des troubles anxieux généralisés, un stress post-traumatique, des pathologies encore mal connues… Plusieurs comorbidités associées.

 

Moi, par exemple, j’ai développé une fibromyalgie, une encéphalomyélite myalgique, des tremblements essentiels. Je ne dis pas que l’autisme engendre ces troubles mais, pour mon cas, je suis certaine qu’ils ont été comme le fruit de décennies à ignorer mon autisme. Pourquoi ? Parce que comme je ne savais pas que j’étais dans le Trouble du Spectre de l’Autisme (TSA), je me suis trop fortement exposé à ce qui ne me convenait pas, à me forcer à avoir le même emploi du temps que les autres, leurs goûts, leur mode de vie…Bref, à force de vouloir à tout prix m’adapter à un monde qui n’est pas fait pour moi…

 

Je me souviens très bien que je vivais à 100 à l’heure pendant quelques années, or, ce rythme, qui était le « rythme de Mr et Mme Tout le monde » n’était pas fait pour moi. J’ai un rythme de vie plus lent, plus réfléchi. Différent.

 

Bref, le Silence est mon meilleur ami.

 

Pour prendre connaissance de la série en Podcast "La voix d'Aurore", personnage principal de mon roman "Stéréotypie" qui sera publié en mai prochain, cliquez ci-dessous : 

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