
Avoir des amis quand on est autiste :
solitude invisible et quête d’authenticité
"Ce que d'autres appellent sociabilité, je l'appelle combat. Ce que d'autres nomment amitié, je l'appelle miracle."
Il y a des solitudes si discrètes qu’elles se fondent dans le décor des jours. Des solitudes aux contours flous que la société ne soupçonne pas, tant elles ne crient pas.
Être une femme autiste, au fonctionnement atypique, souvent sans diagnostic ou diagnostiquée tardivement, c’est porter un masque social. Ce masque craque rarement en public. Il sourit, il parle à bon escient, il s’adapte... mais il souffre. Il fatigue. Il cherche désespérément l’oxygène d’une relation vraie.
Avoir des amis quand on est autiste — particulièrement quand on est une femme aujourd’hui classée dans les troubles du spectre de l’autisme sans déficience intellectuelle — relève souvent d’un chemin de croix invisible.
Dans ce tumulte silencieux, mon roman Stéréotypie s’invite comme une bouffée d’air poétique. Il ne donne pas de leçons. Il raconte. Il invite à un voyage intérieur, une traversée sensible dans l’univers d’une femme qui perçoit le monde autrement, intensément, douloureusement parfois, mais toujours avec une acuité poétique.
C’est une fiction ancrée dans le réel, un miroir tendu à celles et ceux qui ne rentrent dans aucune case, et qui pourtant rêvent d’être vus pour ce qu’ils sont : des âmes entières.
Cet article est une invitation à explorer ensemble cette thématique de l’amitié difficile quand on est autiste. Il s’adresse autant aux personnes concernées qu’à celles qui les aiment, ou qui veulent les comprendre.
Pourquoi les relations sociales sont-elles si complexes pour les femmes autistes ?
L’enfance d’une fille autiste est souvent marquée par une forme d’adaptation silencieuse. Dès les premières années, elle apprend à mimer les comportements attendus : Ce que l’on appelle "camouflage social" devient une seconde nature. Mais ce masque, aussi gracieux soit-il, étouffe.
Les femmes autistes souffrent souvent d’un diagnostic tardif, voire inexistant. Elles passent sous les radars car elles compensent, elles "s’en sortent bien", elles "ne font pas de vagues". Mais derrière cette apparence de normalité se cache une fatigue chronique liée aux interactions sociales, un épuisement à décoder les émotions, à faire semblant de comprendre l’implicite.
Et puis il y a les attentes sociales : les femmes sont censées être spontanément chaleureuses, intuitivement sociales. Être une femme "décalée", introvertie, est souvent mal perçu.
Les codes invisibles de l’amitié
L’amitié, pour beaucoup de femmes autistes, est une énigme. Les conversations sont pleines d’allusions qu’il faut saisir, de silences qu’il faut deviner. Et souvent, cela ne fonctionne pas.
À quoi ressemble alors l’expérience intérieure de ces relations humaines fragiles ? Dans mon roman Stéréotypie, j’ai tenté de le dire à travers Aurore, un personnage dont la sensibilité est grande :
"Combien de fois Aurore avait pâti de l’insincérité des uns, des moqueries des autres, et, ce, pour des raisons qui échappaient complètement à sa compréhension. Les centres d’intérêt, les mœurs, les conversations différentes n’expliquaient pas tout du grand écart qu’elle ressentait entre les autres et son cœur. [...] Elle croyait à l’amitié, à l’amour, à la tendresse, à la grandeur d’âme. Simplement, elle en avait conclu qu’elle n’était pas douée pour la réciprocité. Elle ne se fermait pas aux nouvelles rencontres, non, mais enfin elle ne les cherchait plus."
Ces mots, je les ai écrits avec la conscience aiguë que beaucoup d’entre nous, femmes autistes ou pas, les avons vécus dans notre chair. Faire des efforts, espérer, attendre, se heurter aux absences, aux demi-promesses, aux liens qui s’effilochent sans explication. Et pourtant, continuer d’y croire, encore.
Ce que le roman permet de révéler
Face à ce monde social parfois inaccessible, l’écriture devient refuge, fenêtre, cri silencieux. Le roman offre ce que la vie ne donne pas toujours : la lenteur, la profondeur des silences.
Un roman permet d’entrer dans l’intériorité d’un personnage. Il fait ressentir, il met en lumière ce qui échappe au regard. C’est ce que j’ai voulu faire avec Stéréotypie. Non pas faire un livre "sur l’autisme", mais un livre avec une voix autiste, une manière d’habiter le monde, d’aimer, de penser, de douter.
La fiction peut rendre visibles les luttes intimes. Elle peut être une passerelle entre des univers sensoriels, émotionnels, spirituels très différents.
Conclusion : La solitude n’est pas un vide, mais une autre forme de présence
Peut-on vivre sans amis ? Peut-être. Mais peut-on vivre sans lien ? Non. Le lien peut être : un regard, une lettre, un livre.
L’autisme n’est pas l’absence de désir de lien. C’est parfois la peur d’être encore rejetée. Mais il existe des amitiés sincères, durables. Et parfois, ce lien, c’est un livre qui le tisse.
Et vous, qu’en pensez-vous ?
Avez-vous, vous aussi, vécu des amitiés douloureuses, ou au contraire des rencontres inattendues et précieuses ?
Je vous invite à partager votre expérience, vos lectures, vos émotions en commentaire. Vous pouvez aussi vous abonner à ma newsletter pour ne rien manquer de la sortie prochaine de mon roman Stéréotypie.
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