La danseuse

Une petite danseuse auréolée d’un tutu blanc, comme la neige, comme le coton, comme le nuage, comme la pureté. La pureté blanche des pâquerettes au cœur jaune. Telle est ma danseuse intérieure.

 

Elle virevolte au gré des saisons du cœur. Elle est si gracieuse, en entrechats, en sauts de biche, en arabesques d’hirondelle. Elle danse comme on vole. Avec le même sourire à l’heure du printemps. Avec les mêmes transports les soirs d’été.

 

Quand vient l’automne pourtant, elle devient feuille emportée par le vent. Les bourrasques en tutu la cueillent pour la poser où elle ne voudrait pas. Mais il faut bien mourir. On meurt tous un jour. Ma danseuse intérieure n’y échappe pas qui s’en va s’allonger sur le sol avec la pluie.

 

C’est le temps des crépuscules et des couchers de soleil, des couleurs ocre et rouille. Elle danse alors dans le cœur d’une larme. Je la vois tourner dans sa transparence jusqu’au chagrin sans mesure et sans fin.

 

Puis vient l’hiver, l’hiver tout blanc, enseveli dans le froid. Les pieds gelés, le visage rouge. Elle valse en tutu sous les réverbères de glace, toujours dans la pureté, toujours en cristal comme les flocons, comme le verre, comme nos pleurs sur nos bitumes gris.

 

Quel contraste saisissant, cette petite danseuse au milieu des flocons de nos amours, dans le centre de nos deuils.  Avec ses pointes douloureuses, elle tournoie en carrousel pour étourdir sa peine, si seulement je pouvais me fondre en amnésie dans la poudreuse et le gel !

 

Oublier l’amour qui meurt toujours un peu, se perdre sur la scène de nos vies mystères, puis danser, danser, danser, comme le vent dans les feuillages, comme les saisons qui passent, comme une infinie rengaine. Oublier, danser puis se perdre, c’est tout pareil.

 

Danser comme on aime. Comme on vénère. Comme on se donne, se donne, se donne. Toujours. Sans jamais rien espérer que d’aimer. Encore et toujours. Danser, aimer, donner, c’est tout pareil.

 

Laissez ma danseuse s’immerger dans la chorégraphie de mon cœur. Elle a besoin, oh oui, si vous saviez comme elle en a besoin, de cette danse, de cette mélodie, de ses jambes à tourner, de ses bras à lever. La tête penchée, elle n’a plus qu’un métier : voler dans son désir. Dans ses amertumes et ses regrets. Dans ses joies et ses allégresses éphémères.

 

Une petite danseuse auréolée d’espérance dans le cœur de l’Amour sans fin, elle vit de foi, elle vit sans bien savoir pourquoi. Mais enfin elle vit.

 

Ma danseuse est un rubis, un diamant sous le soleil, elle traverse les temps éphémères. Un jour, je la verrai voler vers le ciel, avec les ailes des anges. Un jour peut-être…

Mais pour l’instant, elle danse sans plus s’arrêter, sur la scène d’un cœur solitaire.

 

Un ballet esseulé sur mon île intérieure.

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