Rampez nu comme un ver aux pieds de votre Créateur !

« Rampez nu comme un ver aux pieds de votre Créateur ! »

 

Voilà la phrase qu’on a jetée, comme une pierre, au visage d’un ami athée. Comme si une telle injonction pouvait donner envie de croire. Comme si se prendre pour un ver suffisait à devenir humble. Comme si embrasser la poussière pouvait rapprocher de Dieu.

 

Non. Personne n’a le droit de dire cela sans connaître le chemin d’un autre. Peut-être, parfois, après un long cheminement, ces mots trouvent un sens. Mais adressés à un cœur en recherche, à quelqu’un qui ignore encore la Bonté de Dieu, c’est une maladresse cruelle.

 

Pour mon ami, ces paroles n’ont fait que creuser la distance avec le Bon Dieu. Sa vie portait déjà tant d’humiliations. Imaginez un enfant malmené, abusé, devenu adulte, à qui l’on dit : « Rampe comme un ver ». Que pouvait-il ressentir sinon une révolte ? « Moi ? Ramper ? On m’a déjà piétiné, bafoué, rejeté. Il faudrait encore revivre cela avec Dieu ? Non, merci ! »

 

Je pense à une autre personne, elle aussi brisée dès l’enfance. Pour elle, plier les genoux signifiait revivre l’horreur des coups et des humiliations. Comment aurait-elle pu trouver la paix dans ce geste ? Comment croire que ces agenouillements imposés l’auraient menée à Dieu ?

 

Avant de jouer au petit directeur spirituel, mesurez ce que vos mots déclenchent. Laissez vos sentences. Vous ne faites qu’ajouter du mal.

 

Ce dont mon ami avait besoin, ce n’était pas d’un Dieu qui l’écrase aux pieds de son trône, mais d’un Père qui le prenne sur ses genoux, qui le serre contre son cœur, comme Jean le disciple bien-aimé. Il avait besoin d’un cœur à cœur, pas de boue avalée dans les tranchées.

 

Et mon autre amie ? Elle n’avait pas besoin de s’agenouiller. Elle avait besoin qu’on l’écoute. Qu’on lui demande pourquoi. Qu’on accueille son refus, au lieu de l’accuser de fausse humilité.

 

On ne donne pas Dieu à coups de sermons, comme on imprime des bleus sur une âme. Ni par les sentences assénées pour se sentir maître. Ni par force, injonctions, menaces ou morale lourde. On ne donne pas Dieu par domination.

 

Jamais.

 

À des adultes blessés, qui ignorent encore leur soif de Dieu, pourtant si puissante, qui se méfient des hommes, souvent à raison, ne demandez pas de ramper ni de baisser la tête !

 

Si quelqu’un doit s’abaisser, que ce soit nous.

 

Donnons-leur plutôt la lumière de notre sourire. La douceur de notre regard. La chaleur de notre présence. Écoutons-les. Choisissons nos mots comme on choisit des fleurs. Offrons notre joie, notre gratuité, notre amour.

 

De quoi mon ami avait-il vraiment besoin ?


D’un Dieu qui s’agenouille devant lui pour lui laver les pieds.
D’un Dieu qui lui demande pardon pour toutes ses blessures. (C’est théologiquement faux mais psychologiquement souvent nécessaire. Et Dieu le sait…).
D’un Dieu qui, avec lui, ait connu les gifles, les abus, les trahisons, les abandons, les rejets.
D’un Dieu qui s’abaisse jusqu’à la déraison, rien que pour lui.

 

Est-ce qu’une fleur pousse plus vite si on tire sur sa tige ?
Est-ce que la charrue avance sans chevaux ?
Est-ce que l’automne s’en va plus tôt parce qu’on le désire ?
Est-ce qu’un cœur s’ouvre sous la contrainte ?

 

Non. Non. Non.

Stop.

 

Soyons humbles. Soyons justes.

 

Mon ami n’a pas la foi. Mais surtout, il n’a pas encore rencontré l’Amour de Dieu. Alors, donnez Dieu par votre joie, par votre prière silencieuse. Par votre rayonnement.

 

Jamais par force.

 

J’ai vu trop de vies écœurées à tout jamais par la dureté de certaines personnes croyantes. Trop d’âmes blessées au point de ne plus jamais franchir le porche d’une église.

 

Et tout un chemin d’amour avec Dieu se brise ainsi.

 

Toute une vie. Toute une vie.

 

Est-ce qu’on se rend compte ?

Non par force. Jamais. Jamais.

Jamais.

 

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