Deux Amours, Deux visages

Deux amours, deux visages

 

Deux amours, deux visages

Il y a, entre Ancolies et moi, une ligne subtile mais profonde : notre manière de comprendre l’amour.
Lui, il cherche dans l’amour humain un absolu.
Moi, j’y cherche la trace du divin, la présence invisible qui relève et éclaire.
Nous parlons du même mot, mais pas de la même lumière.

 

L’amour blessé d’Ancolies

Chez lui, l’amour est comme une brûlure nécessaire, un besoin de se sentir vivant dans un monde trop froid.
Ses textes disent le désir d’aimer, mais aussi l’impossibilité de le faire sans souffrir.
Ce n’est pas Dieu qu’il cherche, mais une intensité qui lui ressemble.
Sa parole est belle, émouvante, souvent douloureuse : celle d’un homme qui espère encore, même quand il prétend ne plus croire.

Dans ses mots, cette tension éclate :

« Je me réjouis des pages à écrire. Demain matin j’ai mal au dos, aux dents, mal aux amants non-dits et aux hommes sœurs désunis… Bref, demain matin j’ai la fête et le cafard. Et cette saleté de solitude bien sûr. »
(Le puits du temps)

Il y a chez lui ce mélange d’humour et de désespoir, de lucidité et de tendresse contenue.
Son amour est blessé, mais c’est cette blessure même qui le rend vivant.

 

L’amour comme offrande

Moi, j’ai écrit un jour :

« Il y a mille façons de soigner la mort qui vous détruit, mais une seule encore à vous guérir : Aimer. Même sans vous, même sans mots, même sans comprendre, même sans retour. Voilà, c’est tout. Je vais vous aimer. »

Dans ces lignes, je ne parle pas d’un amour humain à conquérir.
J’y dis l’élan d’aimer comme une offrande, même blessée.
C’est une fidélité intérieure, une manière de laisser Dieu aimer à travers soi.
L’amour ne m’appartient pas ; il me traverse.

 

L’amour comme trace du divin

J’ai pris le temps, dans ce livre, de raconter une expérience fondatrice :

« J’ai fait l’expérience d’un Amour au-dessus de tout amour.
C’était comme si quelqu’un pleurait avec moi mes douleurs familiales, comme si je sentais que le vent, c’était Lui…
Il n’y avait ni mots, ni visions, seulement une certitude intérieure : je n’étais pas seule.
Je me suis sentie aimée. D’un amour indicible qui dépasse tout, un amour qui console sans parler, qui relève sans bruit. »

Cette expérience, je l’ai partagée à Ancolies.
Il en fut ému, mais aussi surpris, comme si cet amour-là lui restait étranger, trop vaste pour ses plaies.

Oui, pour moi, l’Amour est une trace du divin.
Non pas une idée, mais une présence réelle, intime, qui se manifeste jusque dans nos manques.

 

Deux chemins, une même soif

Nos chemins ne se confondent pas.
Nos voix se rejoignent pourtant dans une même soif d’éternité.
Lui appelle cela la vie, moi j’y entends la grâce.
Entre ses mots et les miens, il y a ce silence commun où l’amour, même blessé, garde le dernier mot.

 

Aimer malgré tout

Dans nos échanges, j’ai souvent eu le sentiment que l’amour véritable commençait là où cessait la possession.
J’écrivais :

« Le pardon, c’est dire à l’autre : tu es plus grand que ta faute. Et c’est justement à ceux que tout condamne qu’on doit le plus tendre la main. »

Aimer, c’est refuser de réduire l’autre à ses manques, c’est croire encore en sa lumière, même quand elle tremble.
C’est dans ce regard que je reconnais la présence de Dieu : un regard qui ne condamne pas, mais qui relève.

 

L’amour, ce silence qui écoute

Christian Bobin a écrit :

« L’amour, c’est peut-être cela : faire silence pour que l’autre entende le bruit de sa propre source. »

Cette phrase me touche profondément.


Elle rejoint ce que j’ai voulu dire à travers L’Offrande et la Fronde : aimer, c’est se tenir près de l’autre sans vouloir le réparer.


C’est être là, simplement, dans la présence qui écoute.


Entre la fronde et l’offrande, il n’y a pas de victoire à remporter, seulement une lumière à laisser passer.

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