La peur du silence intérieur

La peur du silence intérieur : et si le vide était un passage secret vers soi ?

 

  1. Une société bruyante, un mal silencieux

 

Dans notre monde saturé de bruit, le silence devient suspect. Il gêne, inquiète, fait naître un malaise que l'on tente immédiatement de combler. Il suffit de monter dans un train, de s'asseoir dans une salle d'attente, ou même de rentrer chez soi : très vite, les gestes deviennent automatiques. On allume la radio, on défile sur le téléphone, on parle même pour ne rien dire. Le vide fait peur. Non pas un vide tangible, mais ce creux plus subtil : la peur du silence intérieur.

 

Cette peur n'est pas anodine. Elle nous suit, discrètement, à travers nos journées remplies. C'est elle qui nous pousse à surcharger nos emplois du temps, à chercher le divertissement perpétuel, à fuir les moments où plus rien ne vient occuper l'espace. Dans cette fuite du silence, se cache parfois une fuite de soi. Car le silence, loin d'être absence, est en réalité une présence.

 

  1. Solitude choisie ou isolement subi ? Repenser notre rapport au vide

 

Le mot solitude effraie, tout comme celui de vide. On les associe trop souvent à l'abandon, à l'exclusion ou à la tristesse. Pourtant, il existe une solitude choisie, volontaire, douce. Celle que l'on appelle à voix basse. Le tumulte nous épuise. On souhaite retrouver un peu de souffle.

 

Aurore, l'héroïne de mon roman Stéréotypie, incarne cette solitude assumée. Dans son petit studio, elle n'est pas coupée du monde : elle est connectée à un monde plus intime, plus subtil. Son silence n'est pas un repli, mais un refuge. Un espace protégé où elle peut laisser exister ses gestes, ses pensées, ses mémoires.

 

Il y a une beauté à réhabiliter dans la solitude choisie. Elle permet de faire le tri, de respirer, de s'écouter sans l'interruption constante des sollicitations extérieures. Ce silence-là n'est pas vide. Il est rempli de soi.

 

  1. Ce que le silence intérieur nous révèle : la parole de l'âme

 

C'est est une phrase que l'on devrait pouvoir se dire sans peur : "je me tais pour m'écouter". Car dans le silence, on entend. Pas avec les oreilles, mais avec l'âme. Les intuitions se précisent, les blessures remontent, les souvenirs viennent frapper doucement à la porte.

 

Aurore, dans son balancement régulier, semble vivre cette expérience. Sa stéréotypie, ce geste répétitif souvent mal compris, est une forme de langage silencieux. Un poème corporel adressé à elle-même. Une méditation en mouvement.

 

Dans notre propre silence intérieur, il y a aussi des mots sans voix, des messages que la vie quotidienne étouffe. Les entendre suppose de ne plus craindre ce qui surgit quand tout s'arrête. C'est souvent dans ces instants suspendus que les vraies questions surgissent : "Qui suis-je vraiment ?" "Qu'est-ce qui compte pour moi ?" "Où ai-je laissé mon émerveillement ?"

Quand le silence devient miroir :

Se taire, c'est se regarder. Non pas pour se juger, mais pour se reconnaître. Et parfois, pour la première fois depuis longtemps. C'est une spiritualité de l'écoute, une forme d'oraison où l'on redevient enfin présent à soi.

 

  1. L'art de ralentir : créer un espace pour l'écoute de soi

 

Nous vivons à une cadence qui n'est pas la nôtre. La performance, la rentabilité, la vitesse ont envahi nos rythmes naturels. Or, le silence intérieur ne se livre qu'à ceux qui ralentissent. Il se mérite comme un jardin secret.

Ralentir, ce n'est pas être moins efficace. C'est lire lentement, marcher sans but, boire un thé sans vérifier son téléphone. C'est s'autoriser à ne pas remplir chaque minute, à laisser de l'espace entre deux activités. C'est s'offrir des instants de respiration où l'âme peut enfin souffler.

 

Aurore vit ce ralentissement comme un mode de vie. Elle apprivoise ses silences, les transforme en paysages intérieurs. En cela, elle offre un modèle d'existence contre-courant, proche de ces lecteurs qui cherchent dans la littérature un rythme plus humain.

Le silence n'est pas un arrêt. Il n'est pas vide, mais plein de ce qui vient ou de ce qu’on a vécu.

 

  1. Apprivoiser la peur du silence intérieur : une réconciliation douce

 

Ce que nous fuyons le plus, parfois, est ce qui peut nous guérir. La peur du silence intérieur n'est pas une faiblesse, mais un appel. Une invitation à entrer en soi, à déposer les armes, à cesser de vouloir tout expliquer. Elle peut devenir un chemin vers la paix.

Il ne s'agit pas de faire le vide, mais de laisser la place. Place à ce qui respire en nous, à cette présence discrète qui nous habite depuis toujours.

 

Stéréotypie est né de ce silence-là. De cette écoute lente, presque sacrée, d'un personnage en quête d'elle-même. Aurore n'est pas une héroïne de roman classique. Elle est une voix murmurée. Un silence assumé.

 

En apprivoisant le silence intérieur, nous cessons de nous fuir. Nous commençons enfin à nous rencontrer.

 

Et vous ? Comment vivez-vous le silence ? Qu'est-ce qu'il vient dire, en vous ?

 

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